« Ma démarche de cinéaste consiste à tenter exactement de percevoir l’invisible. » John Carpenter

Avec « Invasion Los Angeles », John Carpenter, dans le registre d’une science fiction politique et sociale sur l’ère reaganienne, choisit de renoncer à l’innocence du regard en dévoilant la réalité et le monde tel qu’il est.
Situé entre « Le monde sur le fil » de Fassbinder (1973) et « Matrix » des frères Wachowski (1999), ce film propose au spectateur d’apprendre à voir et transformer ainsi son regard en instrument de lutte politique.
Dans cette improbable série B qui a pour héros des chômeurs et des routards, les conventions scénaristiques ou les règles de la narration classique sont balayées d’un revers de main : à l’instar du faux raccord qui n’est plus une erreur mais un procédé libre et salutaire.
La vision est une question d’éthique et de mise en scène qui s’oppose à l’uniformisation des représentations, à l’idée de programmation et à la dictature visuelle du divertissement, de la bonne humeur et du politiquement correct.
Les héros de Carpenter découvrent ainsi que des images « sales » permettent de dévoiler la supercherie de ces images que l’on voudrait « propres » (publicitaires ou médiatiques). Mais ils comprennent également « qu’apprendre à voir c’est prendre conscience d’être vu. Et être vu c’est risqué d’être tué ».

Thierry Cormier